POURSUIVRE ENSEMBLE LE CHEMIN DU SYNODE
Mgr Laurent Ulrich, archevêque, en partance pour Paris a approuvé cette synthèse des 600 contributions du diocèse, opérée par le bureau du Conseil diocésain de Pastorale après une assemblée diocésaine : Claire Messager, secrétaire générale, Dorothée Malik, LEME, Marie-Christine Tavernier, Sœur Bénédicte Delaby, auxiliatrice, Emmanuel Magdelaine, diacre, Pierre D’Arras, Père Damien Bindault et Père Bruno Cazin, vicaire général
Etape 1 : Comment s’est déroulé le processus de consultation ?
Près de 600 réponses nous sont parvenues de paroisses, mouvements, aumôneries, groupes divers, individuels et familles. Ils se sont approprié la démarche synodale de façon différenciée. Des enfants en catéchèse ou en action catholique des enfants (ACE) ont participé, parfois avec des dessins. Des chrétiens ont eu l’audace d’inviter largement dans leur voisinage ou des couples qu’ils avaient préparé au mariage. Des assemblées paroissiales ou de mouvements ont rassemblé une majorité de personnes d’âge mûr, mais étudiants et jeunes professionnels n’étaient pas en reste. On a observé un climat de grande liberté, un vrai bonheur d’échanger et de chercher ensemble surtout après la période COVID. Quelle richesse !
Les relecteurs, 5 équipes de 3 ou 4, touchés par l’investissement conséquent de milliers de diocésains – « j’ai eu l’impression de voir les gens derrière les réponses. Ils écrivent de tout leur cœur » – ont effectué un beau travail de lecture et de discernement. Ils expriment le bonheur d’avoir vécu une telle expérience d’Eglise, d’être ainsi témoins de la vitalité du diocèse. Ils pointent la diversité des réponses et la convergence de thèmes récurrents. Ils notent une différence entre les réponses scolaires et stéréotypées des questionnaires et la richesse des synthèses de ceux qui ont travaillé à partir d’expériences concrètes. C’est là qu’ils ont repéré des pépites.
Notre diocèse a vécu de 2013 à 2015 un concile provincial sur l’avenir des paroisses. La démarche actuelle a pointé une insuffisance de communication sur les fruits de ce synode pourtant largement exposés dans une lettre pastorale de notre archevêque en mars 2019i. Certains craignent que les fruits du synode sur la synodalité « soient enterrés comme les précédents », d’où une double invitation : communiquer dès maintenant la synthèse diocésaine et encourager la poursuite de la réflexion localement et au niveau diocésain.
Dans la paroisse populaire de la Fraternité à Roubaix, une équipe de 20 « serviteurs de la démarche » du synode s’est constituée sur la base du volontariat. Elle a réalisé des interviews et animé des rencontres qui ont mobilisé plus de 200 personnes. L’équipe a remarqué que 80% des contributions concernaient la paroisse. L’équipe d’animation paroissiale (EAP), le curé et quelques serviteurs poursuivent la démarche localement : « humour, fraternité à toutes les sauces et dans toutes les assiettes ! » rapportait l’équipe joyeusement lors de notre assemblée diocésaine.
Notre diocèse a un habitus synodal bien ancré, ce qui ne le dispense pas de conversions à opérer pour l’être davantage et orienter communion et participation vers la mission. En effet, la quasi-totalité des paroisses est dotée d’EAP. Trois équipes missionnaires regroupant différents états de vie et une vingtaine de coordinateurs paroissiaux, mis en place depuis la promulgation des actes du concile provincialii, relèvent de cette dynamique avec un travail d’équipe renforcé pour les premières et une expérience intéressante de vis-à-vis prêtre-laïc pour les seconds.
Le Conseil diocésain de pastorale (CDP), dont le bureau a été chargé de la mise en œuvre de la phase diocésaine du synode prend la forme d’une assemblée regroupant les représentants des conseils du diocèse (presbytéral, épiscopal, vie consacrée, apostolat des laïcs, diaconat, laïcs en mission ecclésiale, consulteurs), représentants des doyennés, mouvements, services diocésains, enseignement catholique et Université catholique, directeurs des maisons diocésaines, conseil diocésain des jeunes et fidèles concernés par le sujet traité. La phase diocésaine du synode a été initiée lors d’un CDP début novembre 2021. La présente synthèse a été rédigée après une assemblée diocésaine, calquée sur le CDP, le 4 mai 2022, avec la présence des relecteurs, dans un climat de prière et une démarche liturgique présidée par notre archevêque, récemment nommé au siège de Paris. Le fruit principal de cette démarche : le désir d’une Eglise plus souple, simple et ouverte. La lettre pastorale de Mgr Ulrich de Pentecôte 2018iii parlait d’une Eglise légère et joyeuse. Nous pourrions décliner ce souhait comme un appel à la conversion vers moins de lourdeur, de normes ou de comportements qui excluent et y discerner un véritable élan missionnaire. En effet, si à la première lecture des synthèses on entend des cris et des revendications, l’Esprit nous invite plutôt à discerner des attentes, des souhaits et même des rêves en faveur d’une Eglise plus synodale, participative, inclusive, accueillante à la diversité des situations, plus fraternelle et conviviale.
Etape 2 : Quelle expérience de la synodalité a été vécue au cours de la phase préparatoire ? Joies, questions, tensions, fruits…
« Les rencontres ont permis de nous mettre à l’écoute et parfois de nous ouvrir aux personnes qui nous entourent ». Une prise de conscience a émergé sur la nécessité d’outils adaptés pour faciliter la prise de parole, l’importance de prendre son temps pour faire émerger des expériences. Le ciment des échanges semble bien être la Parole de Dieu. L’importance de la vie en équipe, pour faire Eglise, montre des fruits visibles aux rencontres, repas, prière et échanges : la joie que cela procure est évidente. Pour réaliser ces temps conviviaux, il est souhaitable d’avoir des leaders, mais « l’essentiel est dans la capacité à s’écouter. Cela s’apprend ».
De vraies fraternités de proximité ont été vécues. « Des repas fraternels – « la pastorale de la fourchette ! » – ont mobilisé une centaine de personnes : solitudes brisées, espaces de libertés agréables ». « Certains partages ont fait grandir l’esprit de famille entre paroissiens ».
L’expérience des gens du voyage illustre l’importance des rencontres aux périphéries : Il a fallu mettre de côté nos peurs, et l’entre-soi. C’est dans ces conditions que le faire route ensemble ouvre de nouveaux horizons. Le repas pris en commun a fait remonter des méfiances réciproques. Mais de vrais échanges ont eu lieu, qui ont permis de souligner la richesse du partage de certaines différences. « L’Eglise, ça veut dire : transformer son cœur en plus grand . »
Des expériences de dialogue avec des plus jeunes ont favorisé la prise en compte d’un parler vrai, sans tabou. Des débats ont vu le jour grâce à un esprit critique et intergénérationnel. Des jeunes ont dit la difficulté à prendre la parole devant leurs aînés. Ils ont davantage confiance pour s’exprimer dans de petits groupes de leur génération, mais soulignent les expériences positives de dialogue en Eglise. Pour eux, c’est cela faire synode. Ils préconisent d’autres formes de témoignages utilisant les nouvelles technologies. Ailleurs, on note la difficulté de rejoindre les jeunes. C’est une préoccupation majeure et probablement un biais de cette synthèse.
Des dimanches d’accueils paroissiaux ont déclenché une « boulimie de découverte de l’Eglise », pour ceux qui ne la connaissent pas encore. « Ouvrons largement les portes et laissons entrer ! On apercevra des étoiles dans les yeux de certains qui d’ordinaire ne savent même pas s’exprimer.
Les expériences synodales vécues ont conclu à l’importance de créer les conditions d’une vraie rencontre, sans à priori, à partir de lieux ouverts sur la société, où chacun a le droit de parole. Ces paroles rejoignent la Parole, il ne faut pas les manquer.
Etape 3 : Ce qui ressort de manière significative et diverse des comptes-rendus.
CE SONT LES 6 POINTS QUI SUIVENT QUI VONT ETRE PARTAGEES ET APPROFONDIES EN PAROISSE
1 Accueillir – Ecouter
Notre Eglise est appelée à « faire route avec tout le monde », en tenant compte des diverses réalités socio-culturelles : divorcés, remariés, homosexuels, célibataires, chômeurs, déplacés… Il est demandé qu’elle remette l’Evangile au centre et suive le Christ, proche des plus petits. Certains mouvements, dont la Mission Ouvrière, ont un savoir-faire pour que les plus fragiles puissent avoir leur place dans la société et dans l’Eglise. « Que nos paroisses s’ouvrent à d’autres, notamment aux non-croyants et soient à l’écoute des personnes qui composent notre société dans leur diversité ». L’accueil en paroisse des familles vivant des évènements heureux ou douloureux (baptêmes, mariages et funérailles) est particulièrement important et donne du fruit.
Notre diocèse vit de belles expériences d’ouverture : tables ouvertes pour lutter contre la solitude, accueil de mineurs étrangers non accompagnés, lieux d’échanges parents-enfants (ACE). Les mouvements : scoutismes (Scouts et Guides de France, Scouts Unitaires de France, Scouts d’Europe), Jeunesse Ouvrière Chrétienne (JOC), Mouvement Rural de la Jeunesse chrétienne (MRJC), aumôneries (enseignement public, étudiantes), groupes de prière, sont autant de lieux ouverts qui accueillent des jeunes non baptisés ou éloignés de l’Eglise, sans oublier les nombreux établissements catholiques d’enseignement, ainsi que l’Université Catholique de Lille.
- Les membres des équipes d’accompagnement de familles en deuil témoignent qu’ils reçoivent bien plus qu’ils ne donnent. L’écoute des familles, souvent loin de l’Eglise, est une source d’enrichissement et de joie : « Dieu nous parle à travers des voix dont on ignorait l’existence la veille. » Les célébrations sont souvent très belles. « C’est formidable de pouvoir célébrer, c’est une révélation ! » Il y a une vraie joie pour des laïcs à célébrer.
- Lors d’un club de marche, le témoignage informel de membres de la pastorale de la santé a conduit des personnes éloignées de l’Eglise à s’engager dans l’équipe ménage de la paroisse, depuis lors constituée pour moitié de non-croyants, qui participent aussi à la confection de la crèche pour Noël.
2 Aller vers
L’Eglise est « en sortie » si elle s’ouvre à l’intergénérationnel, aux personnes extérieures à l’Eglise, croyants ou non, aux personnes à la marge, en situation de fragilité ou de handicap… « Parfois l’Eglise manque d’écoute envers les personnes en précarité ou qui se battent pour survivre ». Il nous faut aller vers l’autre avec bienveillance, en lui faisant confiance, cultiver cette attitude pour créer du lien, faire davantage preuve d’humour.
On note des expériences fructueuses : partages bibliques, Noëls fraternels, évènements festifs, stand de mouvement dans un lieu de passage, échanges sur un livre, partenariats avec la société civile, mobilisation pour une « Eglise verte ». On retient l’invitation à aller vers les personnes âgées, à leur confier des intentions de prière et celle d’offrir aux plus jeunes de participer activement à la vie des communautés, les impliquer dans la préparation et la mise en œuvre des célébrations.
« Nous avons manifesté le visage d’une Eglise proche qui s’intéresse à la vie des hommes, les écoute et leur donne la parole. Une Eglise qui sait faire la fête et célèbre la vie. »
« Aller chercher les gens là où ils vivent et les amener à la salle des noces, comme Jésus le dit. »
3 Adapter le langage
Beaucoup réclament un langage adapté tant dans la liturgie que dans la communication et l’expression publique de l’Eglise. Ils désirent des liturgies simples et joyeuses, en lien avec la vie. Ils préconisent de remplacer parfois l’homélie par un partage de la Parole, de permettre des prières universelles spontanées, de favoriser l’implication de groupes ou mouvements dans la préparation et l’animation des messes. Ils recommandent de promouvoir la relation personnelle au Christ sans se focaliser sur les rubriques du rituel. Ils encouragent les « messes autrement », « les messes qui prennent leur temps ». Ils souhaitent, de temps en temps, des explications sur les rites et un accès plus facile à la Parole de Dieu. Ils dénoncent un langage réservé aux initiés, suggèrent un langage et des gestes simples adaptés à la communauté présente, un vocabulaire accessible. Ils demandent de remplacer les titres actuels des clercs par « frère ».
4 Fraternité, convivialité
Les mots fraternité et convivialité reviennent souvent. Si des témoignages proviennent des paroisses, les expériences en équipes de mouvement sont plus fréquentes et davantage documentées. Les rencontres offrent un temps de partage de vie, de lecture de la Parole et de prière. Des propositions innovantes favorisent la convivialité : kermesse, festival, marche, film ou série aident à lancer débats ou échanges.
Repas partagé, témoignages et enseignements font le succès des groupes Alpha. Leur défi qui peut être celui de toute l’Eglise : avoir l’audace pour appeler en dehors des cercles habituels, toucher des personnes de différentes sensibilités, de toutes générations.
« À l’église, il y a des moments où on doit se donner la main. Moi, je pleurais parce que c’est rare les moments où on dit « Bonjour », où on donne la main à un inconnu ».
« Dès lors qu’on n’est pas nombreux il y a des choses qui bougent. L’ensemble des participants s’accorde sur le bonheur de vivre des temps en petites cellules de fraternité́. »
« La foi ne se vit pas que dans l’église, à chaque endroit où l’on vit, on peut partager notre foi. A travers ce qu’on fait. C’est très important. Revenir comme aux premiers temps de l’Eglise. Recréer des petites cellules. L’Eglise ce n’est pas que la messe. Chaque rencontre est un lieu d’Eglise. »
« C’est important, j’en ai besoin, et en même temps, je sens que l’Eglise qui est dans mon cœur est plus large que cette Eglise-là. C’est bon d’avoir des lieux « autres » pour partager ensemble, c’est peut-être ce qui me manque le plus, pour recevoir. »
« Le dialogue, quand il existe, mène-t-il à la découverte de l’humanité de chacun, humanité à l’image du Christ ? ».
« Peut-être la synodalité se tient-elle ici : être-avec, faire-ensemble et sans relâche, appeler pour ne laisser aucun ouvrier sur la place. »
5 La place des laïcs dans l’Eglise et des femmes en particulier.
La demande est forte pour que tous les baptisés (hommes et femmes) participent à la vie de l’Eglise, que leur rôle dans les célébrations évolue. Certains usages comme la pratique de séparer servants d’autels et servantes d’assemblée manifeste un clivage entre chrétiens de sensibilités différentes.
« Le nombre de prêtres diminuant, l’attente des gens, proches ou éloignés de l’Eglise, reste forte. Il faut pouvoir y répondre ». Les participants s’interrogent sur la place des femmes : les responsabilités qui leur sont confiées ? Leur place dans les instances dirigeantes ? L’institution aux ministères : lecteur, acolyte, catéchiste à conjuguer avec la mission des animatrices en pastorale ? La question est aussi posée de l’ordination diaconale ou presbytérale des femmes. Incompréhension et décalage avec une société qui prône égalité et parité. Beaucoup de laïcs, hommes et femmes, sont très actifs dans l’Eglise, au quotidien et y exercent des responsabilités.
« Baptisés avec des fonctions différenciées à peuple de baptisés »
« Faire évoluer le Droit Canon pour qu’il n’y ait pas qu’une seule personne qui décide. »
« Donner à chaque baptisé la possibilité de faire Eglise en apportant ses compétences. Pour cela avoir un lieu pour les faire connaitre et discerner les charismes. »
« Accélérer les réflexions et la mise en œuvre des nouveaux ministères. »
« Comment montrer cette présence effective des laïcs et parler du peuple des baptisés avec des fonctions différenciées ? »
6 Décloisonner. Définir les rôles et les missions de chacun.
La demande de décloisonner se fait pressante pour une Eglise ouverte à tous, inclusive. La pratique des mouvements ou des aumôneries étudiantes est vantée : intégration de chacun, des nouveaux venus, tout en veillant à ne pas rester entre soi et à s’ouvrir. La conversion à laquelle l’Esprit Saint nous appelle : passer du « JE » au « NOUS ». On cite une collaboration heureuse : « des jeunes se préparant au baptême associés à une démarche paroissiale pour le synode avec des étudiants, des jeunes professionnels et des paroissiens plus anciens ».
Beaucoup déplorent l’organisation de l’Eglise et la posture du « curé qui décide tout et change les horaires de messes en disant : c’est à prendre ou à laisser ! ». Certains proposent de « dépoussiérer les bâtiments et le rapport à la hiérarchie. » « Le prêtre doit être davantage un guide spirituel qu’un chef. La gouvernance pourrait être assumée par un laïc ». Certains recommandent des binômes prêtre-laïc en coresponsabilité.
Peu font mention des EAP, recommandent de faire connaître le mode de désignation de ses membres, de communiquer sur ses décisions et actions. Ils regrettent le manque de transparence du fonctionnement paroissial, préconisent une définition claire des fonctions, la publication d’un trombinoscope, le renouvellement régulier des responsables bénévoles, une relecture annuelle de la vie paroissiale pour éviter aux paroisses de s’installer dans une routine confortable. L’importance de la formation est soulignée pour faciliter les réponses aux appels à la mission.
« La fraternité diocésaine des Parvis explique avoir progressé en synodalité après s’être dotée d’une équipe de modérateurs plutôt que d’un seul modérateur. »
« Proposer un lieu d’écoute avec un référent extérieur, pour exprimer nos souhaits, nos manques, faire des propositions pour une vraie participation. »
Etape 4 : Que montrent-ils de la réalité actuelle de la vie synodale ?
Si les groupes synodaux sont très divers, ils reflètent majoritairement l’expression de laïcs d’un certain âge, très investis en Eglise, en paroisses, en mouvements. De nombreuses petites voix ont aussi répondu : enfants, jeunes, personnes en situation de précarité, malades, détenus…
Des critiques déplorent le cléricalisme et les abus de pouvoir. Les pratiques synodales répandues dans le diocèse manquent sûrement de visibilité : les journées diocésaines de formation des EAP illustrent leur vitalité et la collaboration entre laïcs et prêtres. Le Concile provincial a encouragé un véritable élan missionnaire en favorisant proximité, communion et participation, mots clés qu’on retrouve dans le sous-titre de ce synode. Les priorités pour les personnes pauvres et marginalisées, les familles et les jeunes ont porté du fruit avec Frat’éveil dans les quartiers populaires, les maisons des familles, le Comptoir de Cana… Pentecôte 2018 a relancé une dynamique de conversion missionnaire : aller à la rencontre par des visitations, avoir des coups de cœur pour l’action de l’Esprit Saint, vivre des moments « tout simplement », partager d’autres façons de prier.
Des projets diocésains ont porté du fruit comme les confirmations célébrées pour des centaines de jeunes et d’adultes lors du centenaire du diocèse en 2013 puis en 2018. De belles expériences de marcher-ensemble ont été vécues dans les groupes de préparation, comme c’est le cas chaque année avec le catéchuménat des adultes. La commission d’art sacré a œuvré avec des personnes en situation de handicap pour confectionner le mobilier liturgique et un chemin de croix. Dans l’élan du synode sur la famille, la catéchèse implique plus que jamais parents et enfants dans un élan qui aboutira à la journée diocésaine « Tous en chœur avec Jésus », le 12 juin 2022 à Roubaix. Elle vise entre autres à associer des familles qui ne fréquentent pas l’Eglise de façon ordinaire.
Comment ne pas mentionner les nombreuses associations confessionnelles ou non dans lesquelles des chrétiens font route avec d’autres, en particulier des personnes en situation de pauvreté. Mentionnons les antennes locales du Secours catholique, les conférences Saint-Vincent de Paul, Magdala, l’aide aux migrants, l’Arche, les colocations comme Lazare ou Marthe et Marie. Bien des diacres sont investis dans ce monde de la diaconie et de la solidarité
Les pratiques synodales du diocèse ont une véritable finalité missionnaire. L’Eglise y vit une belle tradition de présence forte à la vie sociale et associative, éducative et culturelle sans oublier son implication au service de l’unité des chrétiens, le dialogue interreligieux et la pastorale des migrants.
Etape 5 : Quels ont-été les « rêves, les envies et les désirs » exprimés ? Quels sont les « petits pas » déjà faits ou à faire ?
Beaucoup rêvent d’une Eglise ouverte à toutes les réalités notamment lors des célébrations, accueillante aux enfants, notamment pour les lectures lors de la messe. Ils encouragent des liturgies variées, ouvertes aux expressions des familles d’origine étrangère.
Que notre Eglise ose multiplier les occasions d’accueil pour développer la fraternité : présence sur les marchés, temps de partage conviviaux de type café du parvis, temps de grâce où la rencontre de l’autre peut se faire en toute simplicité. Pour un accueil et une écoute bienveillants, il est demandé que les accueillants des paroisses soient formés à l’écoute.
« Faire passer l’accueil et le sens avant la règle. »
« Être invitant : il faut ouvrir la paroisse, ne pas rester qu’entre-nous, être accueillant. »
« Laisser la place aux enfants. »
Les pas déjà faits pour aller vers : des tables ouvertes paroissiales, des temps de partage d’expériences pour des personnes en marge, ou avec un handicap intellectuel ou une fragilité psychique, personnes exclues ou en précarité, avec la mobilisation occasionnelle de paroissiens sur des actions humanitaires concrètes comme l’accueil de jeunes mineurs non accompagnés dans les paroisses, l’invitation de personnes extérieures à l’Eglise à des « messe des curieux iv», manifestations publiques comme celle qui faisait suite à une consultation sur la vie des professionnels de santé, « travail soigné », organisée par la mission ouvrière.
Dans les suites de Diaconia, une équipe diocésaine « Osons la fraternité » composée de personnes en situation de fragilité, est à l’origine d’une initiative missionnaire originale : la « caravane de la fraternité ». Elle sillonne les quartiers populaires du diocèse et crée une animation et des échanges avec les habitants.
« La fraternité est systémique dans l’Eglise ». « Sans fraternité, il n’y a pas d’Eglise ».
Le désir est exprimé, d’une Eglise qui va à la rencontre de l’autre, les mains nues en se laissant surprendre, sans jugement, en se situant davantage dans le dialogue. Des pas sont à faire pour plus de confiance envers les acteurs de terrain, libérer des énergies, cultiver les initiatives. On rêve de « chrétiens dans le monde qui témoignent de leur foi et donnent du poids à l’évangile ». Faire un pas de plus, c’est aussi assumer d’avoir des propositions différentes, parfois contradictoires, pour se faire proche de publics divers, partir de la diversité et non de l’unité, être présent sur les réseaux sociaux, participer à des émissions de radio (RCF ou radios locales).
Plusieurs Tiers Lieux d’Eglise se sont développés dans le diocèse depuis le Concile provincial. A partir de portes d’entrée diverses : art, solidarité, convivialité, échanges sur des questions existentielles… ils favorisent la rencontre entre chrétiens et tous venants.
Allier convivialité et spiritualité amène à vivre les rencontres à la manière du Christ : accueillir, écouter, partager, témoigner, avancer. Faire ensemble permet de « s’évangéliser mutuellement ». De nombreux groupes désirent ouvrir des espaces de rencontre dans le respect des différences : accueil paroissial, accueil dans une église ouverte le jour du marché, espace enfants dans l’église, spectacles, propositions hors les murs pour la joie d’être ensemble et se rendre plus accessible.
L’expérience de l’hospitalité de Lourdes à Lille avec ses sept trains illustre la capacité des brancardiers et hospitaliers à faire route avec des personnes malades et des lycéens de seconde du diocèse qui découvrent à leur contact la force de la miséricorde, point de départ fréquent d’une croissance dans la foi et de demandes de confirmation.
Beaucoup souhaitent multiplier les petites cellules d’Eglise, fraternités de partage et de prière comme il en existe déjà : groupes de partage de la Parole de Dieu («www.enviedeparole.org»), fraternités missionnaires, maisonnées, équipes de mouvements…
Fraternité et convivialité sont souhaitées dans les célébrations. Alors que certains réclament une liturgie simple, joyeuse et chantante, d’autres mettent en avant le besoin de sacré avec une liturgie plus traditionnelle et strictement fidèle au rituel. Ce n’est pas qu’une question de génération !
Beaucoup rêvent d’une Eglise plus proche de la société, avec des laïcs en responsabilité, et les femmes au même niveau que les hommes, ce qui suppose une modification du droit canon. « Nous sommes tous prêtres, prophètes et rois ». Déjà, nous pouvons repérer 5 catégories qui contribuent à l’animation du diocèse : prêtres, diacres, consacrés, laïcs en mission ecclésiale, fidèles laïcs bénévoles. D’autres initiatives n’ont pas besoin d’attendre des modifications, comme le partage des tâches avec le prêtre, ou l’animation des célébrations des funérailles. Dans l’une et l’autre notre diocèse a déjà une expérience ancienne et globalement heureuse. Certains préconisent d’instaurer des temps de relecture impliquant prêtres et laïcs, comme des visites pastorales en équipe, afin de faire fructifier les bonnes pratiques et de modifier celles qui fonctionnent moins bien.
Conclusion :
Le synode a suscité un véritable enthousiasme chez beaucoup, heureux de réfléchir à la mission de l’Eglise et à son fonctionnement. Dans des délais assez courts et une période encore marquée par les restrictions liées au COVID, la mobilisation n’a pas concerné toutes les composantes de notre Eglise diocésaine. Si mouvements et paroisses se sont mobilisés, établissements catholiques d’enseignement et associations caritatives n’ont guère contribué à la réflexion. Les préconisations présentées dans ce document sont assez unanimes. Il nous faut cependant reconnaître quelques voix discordantes, les voix de jeunes plus soucieux d’identité et de respect de la tradition, les voix de ceux qui souffrent d’exclusion…et de ce fait cultiver la communion.
Si des évolutions structurelles sont nécessaires pour mieux vivre la communion et la participation, donner davantage de responsabilités aux laïcs et en particulier aux femmes, la question de la place du prêtre et de l’appel au ministère presbytéral est cruciale. Comment ne pas penser en termes de pouvoir mais de service ? Comment penser l’ordre comme un sacrement, don de Dieu à l’Eglise pour qu’elle reste enracinée dans le Christ ?
Le pas de plus que l’Esprit nous conduit à discerner est de l’ordre de la conversion missionnaire déjà engagée : ne pas penser l’Eglise pour elle-même, dans un entre-soi souvent dénoncé, mais comme sacrement du salut que Dieu offre à tout Homme. C’est ainsi qu’il nous faut comprendre la forte demande d’un langage adapté dans la liturgie et la parole publique d’une Eglise qui va à la rencontre et entre en dialogue avec la société dans sa diversité.
[i] Mgr Laurent Ulrich, « Serviteurs joyeux et créatifs de la mission de l’Eglise, Lille, mars 2019.
[ii] Actes du Concile Provincial de Lille-Arras-Cambrai, Septembre 2015
[iii] Mgr Laurent Ulrich, lettre pastorale de Pentecôte 2018 : « en conversion missionnaire »
[iv] A laquelle les fidèles habituels peuvent convier des curieux qui bénéficieront d’un accueil spécifique et de quelques explications du rituel de l’eucharistie.