Homélies du dimanche à Saint Pierre – Saint Paul

Homélie du dimanche 14 septembre à St Pierre – St Paul –

Père Charles-Marie RIGAIL

Je vous l’évoquais, nous fêtons aujourd’hui la fête de la croix glorieuse. Paradoxe que cette croix glorieuse, puisque la croix, si on la regarde bien, notamment celle qui est dans le fond de l’Église, elle ne paraît pas si glorieuse que ça. Un homme crucifié, abattu, martyrisé, méprisé. Au bout de sa vie, au sens propre comme au sens figuré. Elle ne paraît vraiment pas glorieuse, cette croix. Et pourtant, si nous l’évoquons et si nous considérons la croix comme un élément de gloire et qu’il y a bien quelque chose, la liturgie, nous le fait comprendre. En tout cas, les lectures que nous avons entendues nous permettent de mieux le saisir. Je ne sais pas si vous avez entendu, la profondeur et la densité des textes que nous avons entendus aujourd’hui, que nous avons eu à écouter, mais ils sont à eux-mêmes des  monuments de  la parole de Dieu. En tout cas, chacun pour lui même dit quelque chose d’extrêmement grand et d’extrêmement beau. Le Père a tellement aimé le monde, qu’il a donné son fils unique. Rien que ces quelques mots pourraient nous suffire à nous nourrir toute cette semaine. Le père a tellement aimé le monde. Et alors ? Si vous avez remarqué en fait  la parole de Dieu nous fait faire comme un chemin par étapes pour nous permettre de contempler cette croix que nous avons probablement assez souvent dans notre quotidien. Il y a celle qui est dans l’Église, celle avec laquelle on entre en procession. Il y a celle qui est au-dessus de l’église et qui est un signe pour la ville. Il y a celle que vous avez dans vos maisons, celle que vous avez reçue à votre profession de foi, celle que vous portez autour du cou, autour du poignet. Enfin bref, à chaque fois, il y a ces croix qui sont dans nos vies, comme des petits signes. Mais signe de quoi du coup ? C’est la question. Alors ? La première lecture. Celle qui est tirée de l’ancien testament du livre des Nombres nous raconte un épisode un peu surprenant. C’est ce qu’on appelle l’épisode du serpent d’airain, c’est à dire qu’il y a une épidémie de morsure de serpent. Et Moïse pour pouvoir permettre au peuple d’être sauvé et de ne pas mourir des morsures du serpent va prendre un serpent, en tout cas en faire un en bronze. L’élever sur un bâton et quand ils regarderont ce serpent. Ils seront sauvés. Et là, c’est Jésus lui même qui, pour une fois, fait l’explication directement de ce que signifie ce passage, puisqu’on l’entend dans l’évangile, une référence au passage de l’ancien Testament. On sait très bien, on le fait tous les dimanches, le lien entre l’ancien et le Nouveau Testament. Mais c’est rare que ce soit Jésus lui même qui le fasse ici aujourd’hui. C’est plutôt simple. J’ai eu le travail qui était déjà fait, Jésus l’avait fait pour moi. Il nous raconte, il nous explique que ce passage, c’est une préfiguration. Et effectivement, le mal qui est le serpent est élevé sur le bois et ce qui lève les yeux vers ce bois sont sauvés. On verra Jésus marqué par le mal, touché par la médiocrité humaine, accablé par l’injustice, être élevé sur la croix. Et il nous rappelle que, eh bien, si nous levons les yeux vers cette croix qui guérit, qui sauve, et bien nous sommes nous aussi guéris et sauvés. C’est resté dans l’imaginaire collectif d’ailleurs, hein, si vous regardez aujourd’hui les voitures des  personnels de santé, Ils ont souvent sur leur voiture un petit macaron avec un caducée, comme on dit, eh bien, vous voyez un serpent enroulé autour d’un bâton, alors c’est à la fois la tradition d’Esculape, le dieu de la médecine, mais c’est aussi, et il y a probablement un lien, un rappel de cet épisode du serpent d’airain, effectivement, le fait d’avoir cette croix qui guérit, qui sauve . Voyez, c’est un peu comme un vaccin, le vaccin, il est fabriqué à partir du virus lui même affaiblit. Eh bien, le Seigneur par la croix nous donne un vaccin, c’est à dire il prend le mal, il l’affaiblit. Et nous, en regardant la croix, eh bien, nous savons que le Christ a vaincu le mal et qu’il nous donne la guérison. Donc c’est le premier point. Première lecture, une croix qui guérit. La 2e lecture nous donne le 2e point. Puisque c’est ce fameux hymne aux Philippiens où Paul raconte l’abaissement du Christ. Jésus s’est abaissé jusqu’à la mort et à la mort de la croix. Et Dieu l’a élevé, vous voyez comme  un ascenseur pour pouvoir monter doit d’abord descendre. Eh bien, on sait que nous, pour pouvoir être élevés par Dieu, il faut que nous descendions, que nous descendions nous-mêmes et que nous descendions dans l’humilité. Et Jésus nous a montré le chemin. Il a pris la dernière place, il s’est laissé marquer par la souffrance, par le péché, par la pauvreté, par la détresse. Et alors il vient nous dire, et c’est ça une énorme nouvelle, c’est que lorsque nous sommes touchés par ça, lorsque nous avons nous aussi des épreuves, eh bien, tout cela peut devenir un chemin de relèvement, un chemin de grâce, de croissance. A condition qu’elle soit offerte et vécue avec Dieu. Ce n’est pas simple, mais c’est un encouragement. En regardant la croix, nous savons que cette croix nous élève où que nous soyons même au plus bas. Puis alors le  3e point, il est donné dans l’Évangile, c’est une croix qui est le signe de l’amour de Dieu. Dieu a tellement aimé le monde qu’il a donné son fils unique, qu’il a livré, qu’il a offert. Et on a le Christ les bras grands ouverts sur la croix, dans un geste immense d’ouverture au monde et de don. Et la croix, elle est pour le monde. La croix n’est pas le signe des chrétiens. Si aussi c’est vrai, mais pas d’abord. La croix est le signe que le Christ est venu sauver le monde. Et c’est pour ça qu’on se permet parfois, comme ici d’ailleurs, lorsqu’on a restauré la toiture de Saint Pierre Saint Paul, on a remis la croix au haut du clocher, enfin en haut de la pointe du centre. Non pas parce qu’on se dit que les chrétiens dominent la ville et dominent le monde et ont un truc écrasant à dire, mais tout simplement parce que cette foi, elle est pour le monde entier. Elle n’est pas simplement réservée aux catholiques et à ceux qui rentrent dans l’église. La croix, elle est là pour le monde, elle est un signe de l’amour de Dieu pour le monde entier. Ce n’est pas un signe partisan, bien au contraire, c’est un signe de salut. Le Christ a les bras ouverts pour le monde entier. Alors évidemment, pendant des siècles on n’a pas osé représenter le Christ sur la croix, mais si vous allez visiter, on en a peu dans la région, c’est vrai, mais des bâtiments chrétiens qui datent d’avant le 5e siècle, vous ne trouverez pas de Jésus sur la croix. La croix est représentée, soit dorée, soit avec des pierres précieuses, soit dans les bras de Jésus qui le portait comme un signe de victoire. Parce que pour nous effectivement, la croix glorieuse, ce n’est pas le signe de la mort de Jésus, c’est le signe de sa victoire. Et donc cette croix, c’est pour ça qu’on l’appelle glorieuse, c’est pour ça qu’elle est dans nos vies comme quelque chose de glorieux, même si le Christ est dessus, parce que c’est par là qu’il est passé et c’est par là qu’il nous entraîne. Alors on va faire une longue liste : mais si tu es dans la Détresse, regarde la croix. Si tu crois que ta vie ne vaut pas le coup, regarde la croix. Si tu as soif, si tu as faim, regarde la croix. Si tu trouves que notre monde manque d’amour, regarde la croix, si toi même tu te sens au fond du trou, si toi même tu as besoin d’espérance, regarde la croix. Tu crois que tu n’as pas de prix ? Si tu crois que les détresses ou les difficultés de ta vie t’ont fait tomber trop bas, regarde la croix. Si tu sens que ta vie te lâche, que tu as les plus belles journées de ta vie derrière toi, que ce qui est devant toi paraît compliqué, regarde la croix. Je pourrai continuer cela encore bien longtemps. Mais ce matin, c’est ce que la liturgie nous propose de faire. C’est ce que l’Église nous encourage à faire. Regarder et porter cette croix, la porter au monde comme un signe à la fois d’une croix qui guérit, comme un signe, une croix qui élève et qui nous pousse à l’humilité. Et comme un signe de la croix qui est le signe de l’amour de Dieu pour le monde entier. Amen.