Assomption de Marie, couronnement de la Vierge

Le couronnement de la Vierge est un immense chef-d’œuvre de la peinture française au tournant de l’époque gothique et de la Renaissance. Peint vers 1455 pour la Chartreuse de Villeneuve les Avignon, il est conservé au Musée de cette même ville, juste de l’autre côté de la rue. Sa grande taille (près de 2 mètres par 2), la monumentalité de la composition, l’éblouissement des couleurs, le foisonnement des personnages, tout participe à la force de l’œuvre et à sa capacité de stupéfaction – sinon de sidération. Elle est même peut-être d’autant plus magnétique qu’elle est image incompréhensible à notre temps. Le sens des symboles nous est si étranger…

On y voit la Vierge montée au Ciel et couronnée par Dieu Trinité, sous les acclamations angéliques et l’adoration des saints (prophètes et apôtres, martyrs et moines, prêtres et évêques, vierges et rois…) On y reconnaitra même François d’Assise, et saint Dominique… Au pied de cette Eglise du Ciel, voici l’un des tout premier paysage peint en Occident. A gauche les murailles de l’Avignon papale baignées par le Rhône, et au loin le mont Ventoux. A droite, ce que l’on imaginait être l’orientale Jérusalem. Mais surtout, au centre, ce Crucifix et ce Chartreux en prière : unique, sublime et indépassable connexion entre la terre et le Ciel, intersession qui unifie l’humain au divin.

Car ce tableau est théologie en image. Sous la forme du couronnement de la Vierge, autre manière de figurer cette Assomption de Marie fêtée en ce 15 août, il représente la finalité de la foi Chrétienne : la divinisation de l’humanité figurée par Marie, l’union à Dieu Trinité de personnes. La colombe de l’Esprit fait le lien : ses ailes sont issues des lèvres du Père et du Fils en tout point semblables – il est Dieu et souffle de Dieu, et son bec se prolonge en couronne apposée. Ni miracle à venir, vain espoir ou illusion des naïfs, mais réalité en espérance. C’est à dire en devenir, déjà à l’œuvre. De part et d’autre la multitude des croyants, eux aussi en Dieu, se réjouissent d’en porter le témoignage.

Cette image en l’éblouissement qu’elle nous procure dit mieux que tout discours, de quelle joie nous pouvons être habités, de quelle splendeur nous pouvons être les miroirs, de quel désir nous sommes embrasés.

 

Mouvements immobiles

Clameur silencieuse

Intensité saturée

Le Ciel pourrait bien ressembler à ça.

 

 

Denis OUAILLARBOUROU

 

Enguerrand Quarton, le Couronnement de la Vierge, 1453-1454. 183×220 – Musée Pierre-de-Luxembourg, Villeneuve-lès-Avignon

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